"Lorsqu'un organisme constate, après
avoir procédé aux vérifications nécessaires, qu'une personne n'a pas droit à la
prise en charge des frais de santé par la sécurité sociale, elle lui notifie
son constat et l'invite à présenter ses observations. La personne fait
connaître à l'organisme ses observations et fournit, le cas échéant, les pièces
justificatives nécessaires au maintien de ses droits. Si les observations
présentées et les pièces produites sont insuffisantes pour justifier le
maintien des droits ou en l'absence de réponse de l'intéressé, il est mis fin
au service des prestations. La personne concernée en est préalablement informée."
Ce référentiel est disponible ici http://solidarites-sante.gouv.fr/fichiers/bo/2017/17-04/s...
On y lit : Ces contrôles seront fondés sur
l’identification et l’évaluation de l’intensité des différents risques
d’irrégularités et leurs impacts pour les différentes catégories d’assurés
pouvant être construites en fonction des différentes informations dont les
organismes disposent ou peuvent obtenir.
Au vu de ces éléments [il sera mis] en œuvre des
contrôles adaptés en termes de diligence ou de fréquence.
Ce référentiel de contrôle a pour objectif
d’expliciter les contrôles attendus a minima par les caisses d’assurance
maladie. Il décrit l’outillage mobilisable à ces fins. Il est précisé par les
lettres réseaux internes à chacun des régimes détaillant de façon
opérationnelle la mise en œuvre de ce référentiel.
La majorité des vérifications résulte de
l’exploitation de traitements automatisés. Les équipes d’agents agréés et
assermentés des caisses pourront être mobilisées et réaliser des contrôles plus
approfondis en cas de doute sur l’authenticité des pièces justificatives
transmises ou afin de réaliser des enquêtes sur place. Ce dispositif sera
relayé également par les programmes de lutte contre la fraude qui pourront
prévoir des campagnes dédiées. La mise en place de ces vérifications est
détaillée par chacun des régimes dans les référentiels nationaux de processus
et plans de maîtrise socle au niveau du contrôle interne.
D'après l'article en vigueur, j'aurais donc été soupçonnée par mégarde d'être une fraudeuse et par conséquent, je me devais de me justifier. Hallucinant, tout de même... Que fait-on de la présomption d'innocence ? N'est-ce pas tout bonnement l'inverse ? Jusqu'à preuve du contraire, une personne est présumée innocente tant que sa culpabilité n'a pas été légalement démontrée. Alors pourquoi exige-t-on des individus lambdas qu'ils prouvent leur innocence ? Surtout quand on sait d'avance par une déduction pleine de bon sens que je suis française rien qu'en lisant mon patronyme. Et qu'il suffirait de contacter quelques organismes pour savoir que je suis encore et toujours domiciliée en France. Ainsi, il m'apparaît de plein fouet que soit l'Etat a drastiquement baissé les effectifs de la CPAM et qu'ils n'ont vraisemblablement plus trop le temps pour faire des vérifications honnêtes avant d'exiger quoique ce soit, ou soit qu'ils chercheraient limite à faire des économies infimes sur le dos des contribuables. En effet, depuis le 1er janvier 2016, avec la mise en œuvre de la protection universelle maladie (PUMA), vos droits sont semi-permanents. Et après tout, je suis loin d'être la seule à qui cette malencontreuse aventure est arrivée.
Pierre, dont le nom a été modifié par mes soins
pour conserver son anonymat, a fait part de son mécontentement sur un forum en
formulant que "Nous sommes nombreux à témoigner avoir fait l'objet d'un
contrôle PUMA par une CPAM alors même que, salariés de longue date, de
nationalité française et résident en France, notre situation n'a pas
changé."
Dans pas mal de cas, les personnes interrogées
avaient aussi mis en évidence un différent avec la CNAM. Se pourrait-il que les
agents chargés des contrôles privilégient les assurés qu'ils présument
fraudeurs suite à un différend ? C'est à se demander si on peut avoir une
démarche aussi peu éthique...
Quant à Louisa*, elle ne comprend pas non plus
pourquoi des soupçons se sont portés sur elle. Elle assurait être "de nationalité
française, mes enfants et mes petits enfants sont nés en France."
Cependant, comme cela peut arriver à n'importe qui elle est "en maladie
longue durée depuis plus de 10 ans" et elle est souvent amenée à être
hospitalisée. Serait-ce la raison pour laquelle elle serait considérée telle
une fraudeuse potentielle ? On croit rêver... pour autant c'est ce qu'il se
passe en réalité en France à l'heure actuelle. Désormais, nous sommes tous
d'office de potentiels fraudeurs pour le système.
Henri*, de son côté, a voulu raconter ce qui
leur était arrivé à sa femme et à lui "pour la première fois depuis des
décennies, ma femme a dû subir une batterie d'examens depuis quelques
semaines". Français depuis des générations, les deux cinquantenaires
proches de la soixantaine ne pensaient pas qu'ils devraient un jour avoir
à justifier d'habiter en France. Il faut dire que par un heureux hasard, tous
les deux n'y sont pas nés. Il ajoute l'air de rien : "Sous
prétexte de combattre la fraude paraît-il, on voit très clairement vers quoi on
se dirige et ce n'est pas rassurant pour nous pour les années qui
viennent. C'était déjà devenu compliqué de discuter avec l'administration,
aujourd'hui et surtout avec l'informatique à outrance, ça va devenir
impossible. Je pense très clairement à des gens de la génération d'avant
nous, des gens qui eux aussi vont tomber malades un peu plus sérieusement que
d'habitude et qui recevront ce genre de courrier. Lamentable."
Pierre a même ajouté "Effectivement, si nous ne savons toujours pas sur quels critères les CPAM nous "choisissent" pour un contrôle PUMA, nous pouvons craindre que des escrocs profitent de cet arbitraire pour récupérer nos informations personnelles à mauvaises fins." Néanmoins, il assure que la nécessité d'un contrôle ne se discute pas, il en va du principe de solidarité de l'Assurance Maladie qui doit exclure les fraudeurs. Toutefois, il devrait être effectué en toute transparence sur des critères connus (typiquement, pour tout le monde, avec une obligation de signaler tous changements de situation, comme pour la CAF).
Catherine* s'est dit-elle aussi surprise "de recevoir mon contrôle PUMA". Elle a continué sur le ton de l'ironie en ajoutant ceci : "De mon côté, il s'avère que je suis une feignasse (mère au foyer) qui ne cotise pas à la CPAM. En tant qu'ayant droit, je suis placée sous tutelle par la sécu vu que mon mari doit faire une attestation pour justifier de ma présence sous son toit. Wow ! Côté humiliation, la sécu fait fort, d'autant, que je me sens tellement coupable de ne pas cotiser que je pratique l'auto médication pour ne pas susciter de frais médicaux à la CPAM." Visiblement, nous sommes nombreux à nous demander sous quel référentiel, notre contrôle PUMA a été effectué. Mais encore faut-il que ces contrôles soient justifiés eux-mêmes par la CPAM ?
Le système de contrôle est plus que jamais
perfectible, et il serait donc plus correct pour tous que les équipes d’agents
agréés et assermentés qu'ils croisent les informations avec d’autres organismes
(les impôts, la CAF, etc…) pour constater que nous existons bel et bien et que nous
sommes bien présents sur le territoire français, et cela d’une manière stable.
Les fraudeurs professionnels qu'ils cherchent à démasquer trouveront
toujours, hélas, le moyen de les contourner. Mais est-ce que nous devrions nous
laisser faire et en payer les pots cassés ?
Et finalement c'est Patricia* qui a essayé de
nous apporter une réponse. "J’ai eu une réponse intéressante d’un employé
de cette bande de menteurs (CPAM). Ce n’est pas une contrôle au hasard. C’est
pour tous les gens qui sont sur les cartes de leurs conjoints pour qu’ils
puissent nous mettre sur le programme PUMA et donc nos propres cartes."
Cette enquête s'avère plus déconcertante que
prévu initialement. Effectivement, j'ai moi-même prescrit à ma propre mutuelle
et je ne suis sur la carte de personne d'autre. Je ne suis pas non plus une boulimique
en ce qui concerne les visites chez le médecin ou la consommation de
médicaments. J'y vais environ une fois par an. En revanche, j'ai envoyé à la
fin de l'année dernière quelques ordonnances que je ne m'étais pas faites
remboursées et dont une qui datait de 2018. Apparemment, c'était amplement
suffisant pour me rendre suspecte.
Enfin de compte, je suis tombée sur un nouvel
élément sur le site amélie.fr. Voici ce que j'ai pu trouver :
Mention d'information PUMA - échanges DGFIP
Mention
d'information sur la protection maladie universelle (PUMA) et les échanges
DGFIP.
Afin
d'assurer le respect des conditions requises pour le bénéfice de la protection
maladie universelle (PUMA), la Caisse nationale de l'Assurance Maladie (Cnam)
met en place un échange annuel de données avec la direction générale des
finances publiques (DGFIP) destiné à vérifier la condition de résidence prévue
aux articles L.114-10-1 et L. 114-10-3 du code de la sécurité sociale,
permettant ainsi le maintien de la prise en charge des frais de santé pour les
bénéficiaires majeurs fiscalement domiciliés en France.
Les CPAM seront par ce biais conduites vers
la vérification plus approfondie du dossier des personnes non connues par la
DGFIP.
Les informations traitées par les CPAM sont le NIR, le nom, le prénom, l'adresse postale, la date et le lieu de naissance et l'identification de la CPAM émettrice.
Ces informations sont transmises à la DGFIP qui fournit les informations suivantes en retour : le code département de taxation de l'individu et la notion de non présence au fichier des personnes majeures fiscalement domiciliées en France.
Je n'irai pas jusqu'à déclarer que la CNAM cherche à nous entourlouper en guise de conclusion, je suis même persuadée que ce nouveau système devait-être plus performant que l'ancien. Malheureusement, le contrôle PUMA a été mis en place d'une manière trop hasardeuse et non aboutie, créant ainsi beaucoup de problèmes aux usagers. Et il est assez évident que les contrôles ne sont pas réalisés de façon très éthique. Comme le disait Patrick*, "Nous sommes en présence d'un emballement de la machine administrative puisque l'un des effets recherchés par le législateur était la "simplification". J'imagine que dans bien des cas ce but louable a été atteint mais ici nous sommes dans le résultat parfaitement inverse et les personnes chargées du contrôle semblent impuissantes à donner corps à la simplification. Je pense suivre vos pas et demander effectivement à la CPAM les critères utilisés, puis, commencer un chemin CADA, médiateur etc. Je ne sais pas si cela mérite de créer une association et de prendre un avocat etc. Ne partant que du cas de ma famille, j'en arrive à me dire que "culpabiliser" une maman qui n'a fait qu'élever paisiblement ses enfants et n'a jamais fraudé un sou à la SS ou à une Mutuelle, n'est pas supportable et frôle l'humiliation. Former un recours contre ce texte ou son application est toujours possible."
*Tous les noms ont été modifiés pour préserver l'anonymat.
Anaïs MARINIER

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